L’ouvrage que doit réaliser le tissage royal, c’est de ne jamais laisser une séparation s’établir entre les caractères modérés et les caractères fougueux, mais les tisser ensemble avec une navette correspondant à la communauté des opinions, des honneurs, des gloires, par l’échange mutuel de gages, pour fabriquer à partir d’eux un tissu lisse et, comme on dit, bien serré, et enfin leur confiance toujours en commun les magistratures dans les cités. […]
Là où il faut un seul chef, il faut choisir pour diriger l’homme qui possède ce double caractère. Là où il faut plusieurs chefs, il faut qu’une partie des deux caractères entre dans le mélange. Les dirigeants qui ont un caractère modéré sont des gens très circonspects, justes et conservateurs, mais à qui il manque le mordant et cet allant vif qui mène à l’action. Quant aux dirigeants qui, pour leur part, ont un caractère fougueux, ils manquent davantage que les autres de justice et de circonspection, mais lorsqu’il faut agir, ils ont plus d’allant que personne. Aussi est-il impossible que tout aille comme il faut dans les cités, dans la vie privée comme dans la vie publique, si ces deux caractères n’y sont pas réunis. […]
En vérité, disons-le, le tissu qu’ourdit l’action politique est achevé lorsque les mœurs des hommes fougueux et des hommes modérés sont prises ensemble dans l’entrecroisement à angle droit de leurs fils. Cela a lieu lorsque la technique royale, ayant rassemblé leur vie en une communauté au moyen de la concorde et de l’amitié, et y ayant enveloppé tous les habitants des cités, esclaves et hommes libres, les tient ensemble dans cette trame, et qu’elle commande et dirige en assurant à la cité tout le bonheur dont elle est capable.
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